Nous voilà rendu à sept mois de voyage et nous venons tout juste d’arriver à Shanghai. Allez, un petit thé et une musique un peu héroïque dans le casque et je me replonge un instant dans le Japon pour vous raconter nos aventures de la dernière semaine. Au programme, un des bœufs les plus cher du monde, la bombe atomique, un tremblement de terre, un deuxième tremblement de terre, des pancakes et du repos à Kyoto. C’est plutôt chargé vu comme ça et je peux te dire que rien que de me rappeler cette semaine, je suis déjà épuisée. Ou alors ce serait les dizaines de kilomètres parcourus aujourd’hui dans les rues de Shanghai ? Possible… Seb s’était donc arrêté sur notre départ de Kyoto il y a déjà dix jours. A notre habitude japonaise donc, nous montons dans un train et la journée s’annonçait assez intense. Nous avions donc prévu de faire un arrêt le midi à Kobe pour voir le chinatown qui apparemment devait être vraiment cool. C’était cool. Mais bon, je vais me payer le luxe de me la péter un peu, maintenant nous sommes à Shanghai donc franchement le chinatown de Kobe à côté de ça c’est de la rigolade. Bref, le réel but de faire un arrêt rapide à Kobe, c’était bien sur pour éclater le budget du mois et manger du bon bœuf. Alors, Seb a déjà expliqué la particularité du bœuf d’Hida que nous avions mangé quelques jours plus tôt mais dans le doute, je répète, pour les deux du fond qui ne suivent pas… Le bœuf de Kobe est donc un des bœufs les plus célèbres, les plus chers et surtout des plus relax du monde. L’animal se paye une vie à manger des bonnes choses dans de jolies prairies bien vertes, on évite de lui causer tout stress, on lui donne de la bière dans son abreuvoir tous les jours et puis comme si cela n’était pas déjà assez luxueux, le bestiaux se fait faire des massages au saké pour détendre encore un peu plus ses muscles et bien imbiber le gras. Et en effet, la viande est d’un tendre impressionnant. On ne l’a pas gouté en préparation comme nous l’avions fait avec le bœuf d’Hida mais là c’était un steak un vrai. Mais attention, un steak raffiné que l’on mange à la baquette donc il est un minimum préparé dans l’assiette en petit bout avec des petits légumes et des petites sauces. La serveuse nous explique comment le gouter, un premier morceau nature, un autre avec sauce soy et wasabi (notre option préférée avec Seb), ensuite juste avec du gros sel et bien sur, tu l’auras compris ensuite tu te débrouilles, tu fais tes mélanges dans tes petits bols et tu dégustes comme tu le souhaites. Bon, je ne vais pas continuer, je me mets l’eau à la bouche toute seule et connaissant ma famille de carnivores, ils doivent aussi avoir la tête qui tourne. Nous quittons donc Kobe, en train toujours, sous une légère pluie avec la peau du ventre bien tendue et le sourire aux lèvres dans le but de rejoindre la ville d’Himeji bien connue pour son magnifique château, ou devrais-je dire, sa magnifique forteresse qui trône en hauteur et qui surplombe la ville. Notre visite sera de courte durée puisqu’une pluie battante et un brouillard épais se sont mis à tomber lorsque nos pieds ont touchés le sol de la gare. Nous avons donc vu notre train repartir et nos chances de voir le château s’effacer doucettement. Pas de soucis, on va se prendre un petit thé, on attend le prochain Shinkansen, on saute dedans direction Hiroshima. Nous arrivons donc toujours sous la pluie qui coulait à flot sur les trottoirs et nous avec nos petites vestes en cuir et nos sacs à dos non protégés nous avions pas fière allure. Nous avons contemplé un moment les gens et la circulation se déchainer dans la rue avant de se dire que bon il fallait bien y aller à un moment car on l’avait compris, la pluie ne s’arrêterait pas. Deux japonais arrivent vers nous en rigolant comme des fous, ils nous tendent deux parapluies et se font aspirer à une vitesse folle par la bouche de métro devant laquelle nous avions l’air d’avoir élu domicile. Nous avons rigolé à notre tour et c’est fièrement avec nos deux grands parapluies blancs au dessus de nos têtes qu’on se met en route vers notre hôtel. Nous sommes tout de même arrivés trempés, entre la forte pluie et le vent, nos parapluies se sont retournés un bon nombre de fois ce qui nous a bien fait marrer et visiblement on faisait un beau spectacle pour les japonais qui ne pouvait s’empêcher de pouffer en nous voyant galérer avec nos gros sacs à dos mouillés, les bourrasques qui nous faisaient voler en arrière et nos chaussures qui faisaient floutch floutch. Le lendemain, après un bon bol de ramen chaud et une nuit au sec, nous nous sommes mis en route pour découvrir, sous un magnifique soleil, cette ville mystérieuse qui pour nous porte le nom du drame lu et relu dans nos livres d’histoire. Nous avons bien sur commencé par aller voir le mémorial qui est plutôt émouvant. Après avoir vu un paquet de mémoriaux sur la seconde guerre mondiale aux Etats Unis, on s’attendait à trouver une œuvre construite par un artiste japonais sensé évoquer tout un tas de trucs. Je me moque un peu mais le mémorial du 11 septembre est impressionnant et vaut réellement le détour. Bref, finalement on arrive devant une ruine, un tas de pierres encore pas trop mal empilées qui après tant d’années tiens encore debout. C’est donc au dessus de ce bâtiment, 600 mètres au dessus très précisément, que la bombe a explosé. Il ne reste rien de la ville, absolument rien, nous avons visité le château, entièrement refait, toute la ville est neuve, seul le dôme reste de l’ancien Hiroshima et tiens debout. C’est du coup assez déconcertant à observer. Nous ne sommes pas resté très longtemps dans la ville, nous avons décidé de vite sauter dans un nouveau joli train et de foncer vers notre prochaine destination. On avait tout juste fixé un nouvel itinéraire sur l’île de Kyushu pour notre dernière semaine. On devait donc aller le plus au sud possible à Kagoshima pour se faire enterrer sur une plage de sable noir et brulant pour détendre tous nos muscles comme le bœuf. L’île de Kyushu est connue pour ses volcans et ses sources chaudes, on avait donc en tête de se faire des onsens et des rotemburo (bain chaud en plein air) et de bouillir comme ça pendant deux jours avant de reprendre l’avion. Ah ben, laisse moi te dire que le plan a vite changé et que de relaxation nous sommes passé à stress intense. A Hiroshima donc, sautons tous ensemble dans un Shinkansen rapide et efficace pour nous rendre dans la jolie ville de Kumamoto qui se situe à peu près au milieu de l’île de Kyushu. Bon, tu sais évidement ce qu’il s’est passé alors je ne vais pas répéter les infos mais raconter les choses comme nous, nous les avons vécues. On arrive à Kumamoto, on marche pas loin d’une heure pour trouver notre hôtel, on aperçoit de loin, une tour un peu moche et un peu pétée qui moi déjà me donnait le tournis rien qu’à la voir de loin. Elle était vraiment moche. On monte au sixième étage et on s’enferme dans une mini chambrette pour se reposer un peu et planifier ce qu’on allait bien pouvoir faire ici le lendemain. Seb se prend un bon bain chaud pour se relaxer, le pauvre s’était bloqué le dos en remettant son sac avant de partir d’Hiroshima. Moi je surf sur internet et nous dégote des superbes activités comme la visite d’une grotte dans la montagne où siègent plus de 500 bouddha méditant et où un samouraï très célèbre, Miyamoto Musashi, a écrit le livre le plus lu du Japon, le livre des cinq anneaux. Seb est évidemment emballé par cette idée et nous devions aussi aller voir le magnifique château noir de Kumamoto qui est considéré comme un des plus beaux du pays. Les japonais eux même se déplacent en masse pour le visiter. Etant bien fatigués, on décide de ne rien faire de la soirée car il faisait déjà nuit et nous nous dirigeons vers le convini le plus proche pour s’acheter deux trois bricoles à grignoter dans la chambre d’hôtel. On se balade dans les rayons, les mains pleines de bonnes choses quand le tremblement a commencé. Alors, moi quand j’imaginais un tremblement de terre, j’imaginais comme un gros vibreur de téléphone portable dans une grosse poche qui se met d’un coup à sonner. Et bien non, ce n’est pas juste une vibration. Tu sais ? Ce moment où tu es sur le canapé et tu veux changer de position ? Tu te retournes, tu fais tomber les télécommandes, tu tapes ton oreiller, tu tournes ton plaid dans tous les sens pour finalement trouver une nouvelle bonne position après avoir foutu un bordel pas possible autour de toi ? Oui… J’ai un passif de glandeuse professionnelle… Et bien, voilà, c’est un peu l’effet que ça m’a fait, le sol s’est d’un coup mis à bouger de gauche à droite sur ce qui m’a semblé être au moins un mètre d’envergure et ce à une vitesse folle. D’abord, tu entends un grondement, comme le tonnerre, puis le sol se dérobe sous tes pieds et tu es projeté dans tous les sens avec les rayons du magasin. Tout le monde s’est planqué, Seb m’a chopé par le col pour me mettre en boule sur le sol et comme ça on a tous attendu que ça passe. Une fois le grattement de fesse des plaques tectoniques effectué, nous nous sommes relevés puis le caissier nous a calmement dit d’avancer, il a enregistré nos articles, nous a demandé si on voulait qu’il réchauffe nos aliments et nous a même fait tirer un petit coupon promo dans une boite. Les japonais sont d’un calme déconcertant. J’étais toute tremblante et Seb me demandait si je voulais des gâteaux pendant que le caissier voulait me faire gagner des trucs gratuits. Chelou. On sort finalement de cette mini supérette, avec le tournis pour regagner notre hôtel. On découvre des bouches incendies et des canalisations éclatées qui se répandent au sol et des vitrines qui n’ont pas tenues le choc. Devant l’hôtel, tout le monde était sortis, la dalle devant l’entrée avait céder sous le choc et les briques étaient toutes cassées. On monte par les escaliers et on découvre des fissures énormes dans les murs, les extincteurs tombés, et les vitres fendues. On se joint ensuite à la foule et on décide d’aller un peu voir en ville les dégâts, pour moi il était hors de questions de rester dans la chambre. Dans la ville, les restaurants étaient complètement renversés, tous les gens étaient dehors à discuter et prendre des photos des trottoirs cassés, des gens nous demandaient si on allait bien, j’étais complètement choquée. On était toujours dans cette grosse rue très animés lorsqu’un deuxième gros tremblement est arrivé. J’ai agrippé Seb par le bras, on a suivis le mouvement de la foule qui a consisté à courir au milieu de la route tête en l’air pour s’assurer que les immeubles ne s’effondraient pas. La majeure partie de la masse s’est aussi mise à hurler, on se serait cru dans un film, vraiment. Les immeubles se sont mis à tanguer dans tous les sens, c’était terrifiant. Seb est resté très calme tout du long mais moi honnêtement j’ai pas pu, j’avais vraiment trop peur. Après ça, on a continué d’avancer, les flics essayaient d’évacuer un peu la rue, on est donc aller vers les rues aux bâtiments bas et vers le château. Un mur du château n’a pas résisté aux secousses. On s’est assis pour essayer de grignoter et on sentait des secousses toutes les cinq minutes, c’était très stressant. Rien que l’idée de retourner dans notre tour au sixième étage, ça me donnait la nausée. Pourtant nous y sommes retourné et quand j’ai senti les toilettes vibrer sous mes fesses, j’ai dit à Seb que je passerais la nuit dans le hall de l’hôtel. C’est là que nous avons fait la rencontre des deux dijonnais et de Val et Julie nos amis suisse. Oui, même à l’autre bout du monde au Japon, on trouve des français et des suisses. Bon c’est bien la première fois que j’étais ravie d’entendre du français et de pouvoir communiquer avec des gens pour parler de nos peurs. Nous avons donc passé une bonne partie de la nuit tous ensemble de l’autre côté de la rue, bah oui rester au bas de l’immeuble quand ça tremble, ça fait trop peur. On était donc posé sur les bords de la rivière à sentir la terre bouger sous nos pieds et a discuter de toutes sortes de choses histoire de nous détendre et de nous tenir éveillé. On a finalement tenté de retourner dormir mais impossible de mon côté donc nous avons erré un peu dans les rues, les gens s’étaient installé dehors avec des couvertures en groupe ou tout seul pour s’assurer qu’un toit ne leur tombera pas dessus dans leur sommeil. La nuit a été très très longue. Le lendemain aussi. Nous avons par tous les moyens tenté de quitter la ville, tous les trains étant arrêtés, il nous a fallu au moins quatre heures de bus pour atteindre le nord de l’île, Fukuoka (ce qui se fait en 40 minutes avec le Shinkansen). Val et Julie eux, l’ont tenté en stop et en trois heures ils étaient eux aussi rendus sain et saufs à la ville dans un nouvel hôtel. Nos dijonnais par contre, avaient une deuxième nuit à passer dans la tour à Kumamoto… Une fois à Fukuoka, ça allait un peu mieux mais j’étais quand même encore très stressée qu’un autre tremblement arrive, Seb lui, toujours pas de stress mais toujours le dos bloqué. Et ça n’a pas loupé, dans la nuit, nous nous sommes fait réveiller par les murs qui se sont mis à trembler de toutes part. Reflex, on s’habille et on descend par les escaliers. Personne dans la rue, juste quelques halls d’hôtels avec des gens qui errent, mais rien de fous, on décide donc de retourner se coucher. Je regarde mon petit site de tremblements de terre, on découvre que celui là était encore plus violent que celui de la veille l’épicentre étant toujours Kumamoto. On a donc suivi comme ça les infos et les intensités des séismes en direct sur nos téléphones tout en essayant de s’éloigner le plus possible. On a donc laissé derrière nous nos jolis onsens et nous sommes retourner vers Osaka et ensuite Wakayama plus au sud. En reprenant le train pour quitter l’île de Kyushu, nous avons retrouvé les suisses dans notre wagon. Le monde est quand même minuscule, nous avons discuter encore une fois de la courte nuit mouvementée que nous avions de nouveau vécue et on s’est promis de s’écrire de se revoir une fois rentré dans nos pays respectifs. Nous avons passé deux nuits à Wakayama pour se reposer un peu mais je dois avouer que je n’étais toujours pas très sereine, heureusement que j’avais mon Seb pour me dire que c’est bon c’était fini et qu’il fallait que je me détende. On aura donc visité un superbe château, on aura beaucoup dormi et lu et manger de nombreux pancakes dans le petit restaurant en bas de l’hôtel. Honnêtement, c’est tout ce qu’il y avait à faire à Wakayama, il pleuvait et c’était une sorte de ville un peu morte, tout était fermé et on croisait sans arrêt des vieux errants. Très bizaaaaarre. Nous sommes ensuite retourné passer un peu de temps à Kyoto car nous avons réellement adoré cette ville. Nous sommes encore aller flâner dans le marché pour se trouver quelques souvenirs à se ramener et penser à autre chose. Nous nous sommes réveillé mercredi avec un peu de tristesse de quitter le Japon. C’était tellement génial. On savait déjà que la cuisine allait nous manquer, les gens et le calme. On s’est un peu remonter le moral en allant se remplir le ventre avec le bar à sushis qui tournent !! Principe, tu chopes les petites assiettes qui te plaisent au fur et à mesure et tu manges vite vite vite parce que la prochaine assiette qui te plait arrive très vite sur le petit tapis et tu as bien remarqué que ton voisin l’attendait aussi. Tu l’as bien compris, le Japon on va y revenir dans très peu de temps, on a eu la chance de venir pour la floraison des cerisiers, maintenant, on veut connaitre l’hiver japonais et l’automne. L’été, on n’est pas sur car il parait qu’il fait vraiment très très chaud. Direction l’aéroport avec nos bedaines remplies de sushis, puis ça y est on décolle pour Shanghai. On a lu et entendu beaucoup de choses mais on a hâte de voir ce que c’est réellement que la Chine, ce pays normalement délaissé des backpackers. Avant d’y arriver, il a fallu que je me fasse un gros stress dans l’avion. Alors oui, j’ai peur de l’avion depuis toujours mais bon d’habitude je me laisse entrainer par les bêtises de Seb et j’y pense pas trop puis une fois bien en l’air, je suis plutôt tranquille. Là, impossible de me calmer, j’ai cru faire une grosse poussée de fièvre et j’ai presque commencé à avoir des minis hallucinations. Trop de sushis ? Un petit flippe post tremblement ? La tristesse de quitter le Japon ? La fatigue ? Franchement je ne saurais le dire, mais ce voyage en avion, on s’en souviendra toute notre vie. J’ai même tenté de discuter avec l’hôtesse de l’air qui ne parlait que japonais ou chinois… Faut dire qu’il y avait beaucoup de turbulences et qu’on avait un petit avion alors après avoir pris les gros airbus qui eux ne bougent pas d’un poil, c’est pas agréable. Bref, nous sommes finalement très bien arrivés en Chine et j’ai enfin dormi comme un bébé. Allez d’ailleurs, il est tard et je vais aller plonger sous les draps car demain c’est encore une grosse journée d’aventures qui nous attend. Zo-