Cher journal,
j'ai perdu le compte du temps. Quelque chose d'étrange est en train de se produire. Une voix d'outre-tombe sort du haut parleur du café. Cela fait trente minutes qu'ils nous abreuvent de musique expérimentale qui aurait plus sa place dans un film d'horreur que dans un coffee shop du fin fond de la Virginie. Les mouvements effroyablement lents de la serveuse et les regards suspicieux de certains clients - dont l'homme à l'imperméable beige, yeux globuleux, queue de cheval et chapeau en feutre vert - n'allège en rien l'atmosphère. Je me sens l'estomac lourd... Mais peut-être que concernant mon estomac, le principal responsable est ce Peanut Butter Mud Bar qui pourrait rationner un pays entier du tiers monde pendant deux jours... Peut-être...
C'est dans cette ambiance chargée que je prends enfin le temps d'écrire un peu - pour quelqu'un d'autre que moi dans ce journal (le reste de mes écrits restera confidentiel pour le moment). Nous sommes le dimanche 4 octobre et ça fera deux semaines demain que ce voyage a commencé. Nous sommes au Bollo's café dans la petite ville de Blacksburg en Virginie, tout proche du campus de Virginia Tech. Et si quelqu'un se demande ce qu'on peut bien faire en ce moment à l'ouest de la Virginie, eh bien... Je répondrai ceci : C'est la faute de Joaquin. Cette petite saloperie ravage les bahamas depuis plusieurs jours et se dirige tranquilement vers l'est des côtes américaines où elle a déjà causé des inondations dans la ville de Charlestone - où nous comptions nous rendre.
Donc merci à toi Joaquin.
Mais bon, revenons un peu en arrière. Nous sommes arrivés à New York le 21 septembre, avons fait face à un douanier adipeux... ça tous les lecteurs assidus de ce blog doivent le savoir grâce au journal de Zoé, je vais donc éviter la redite. Mais oui, il était adipeux au mieux.
Bref, New York... Que dire de New York... Je commence à connaitre cette ville vraiment très bien. C'était ma quatrième expédition en quatre ans et pourtant il y a toujours autant de choses à y faire et à découvrir. J'ai enfin réussi à gouter les pizzas de chez Grimaldi, oui, elles sont très bonnes. Mais comme je n'ai pas testé toutes les pizzas de New York je ne peux pas dire si ce sont les meilleures. La Morgan Library reste mon musée préféré et le Gugenheim une belle arnaque quand l'aile de l'exposition principale est en rénovation. L'IMAX de Time Square dépasse en qualité de projection, de son et de confort n'importe quel cinéma de n'importe quelle ville de France (si vous ne me croyez pas, venez vérifier). En bref, on a passé sept jours à marcher en long, en large et en travers. Chaque matin on se disait qu'on allait y aller cool et chaque soir, on avait marché vingt kilomètres. Car à New York, quand on veut visiter : On Marche! Les New Yorkais sont d'ailleurs des marcheurs eux-mêmes. Ça cavale dans tous les sens à toutes heures du jour et de la nuit. Et la nuit reste une notion bien vague parce que tout est ouvert et qu'il y fait plus clair que dans la journée.
Je ne m'apesantirai pas sur notre moche petite piaule à Chinatown - c'est un scandale de faire payer pour ce genre de merde - car je pense qu'on aura pire pendant l'année. Ensuite, passage à Washington pour plusieurs jours - Merci beaucoup Camille pour ton accueil - où nous avons vécu la ville différement. Beaucoup de choses à voir et merci les taxes pour une fois, beaucoup de musées gratuits. Sinon la vie y est très chère. C'est d'ailleurs après avoir dépensé une somme astronomique en nourriture et avoir toujours carrément la dalle qu'on a décidé de fuir les grandes villes et de découvrir les charmes des petites villes plus reculées où les touristes ne vont pas. Cela a aussi marqué le début de nos recherches d'hôtes pour nous héberger à travers notre voyage. Après s'être heurté à de l'indifférence et avoir commencé à douter de la possibilité de se faire recevoir par qui que ce soit quand on a reçu les permières réponses négatives. C'est toujours drôle comme la météo amplifie certains aspects de la vie parfois. Je me souviendrai longtemps de ce sentiment de rejet et de cette marche sous la pluie battante, nos vêtements trempés pour les deux jours à venir, dans les rues de DC.
Cependant, on a passé de très bons moments à Washington. Les monuments du Mall sont absolument magnifiques à la nuit tombée. Nous avons fait la rencontre de l'étrange Hans face au capitole qui allait tous les ans à Cannes sur mer, en hiver, pratiquer le français avec des retraités du FN ou encore, beaucoup plus intéressant car vraiment très sympathique, Miloud, qui tient le Timgad Café, qui s'est montré très intéressé par notre voyage et a fait preuve envers nous d'une immense gentillesse. Si je devais vivre à DC, je pense que je ferais de ce café une habitude. Et sans oublier Bob non plus, qui nous a appri le shuffleboard (Papa, c'est pour toi) et nous a enmené au Good Guys Club - une boite de striptease sur Wisconsin avenue (Antoine, c'est pour toi). Bref, Washington sera pour nous le début des rencontres de ce voyage. On a commencé à se sentir mieux au moment où le premier message positif est arrivé sur couchsurfing, soulignant que notre projet de voyage avait l'air super et qu'ils seraient ravis de nous recevoir. Et si Joaquin n'avait pas été là, nous n'aurions jamais rencontré nos actuels hôtes Dietrich et Carlie à Blacksburg qui nous font un accueil charmant et nous laisse même utiliser leur voiture pour nous balader dans les environs.
Et pour la suite, que se passera-t-il? Vais-je digérer un jour ce gateau? Ou est-ce lui qui me digèrera? La pluie va-t-elle enfin cesser? Allons-nous visiter ou non la Floride? (Cette question est pour toi Joaquin) Le type au chapeau vert va-t-il nous suivre quand on sortira du café pour essayer de nous éventrer? Tellement de questions qui se posent...
Peut-etre la réponse dans la seconde entrée de ce journal dans deux semaines... Ou peut-être jamais si le type au chapeau vert nous attrape.
Seb